Lundi 12 août, départ pour 6 jours de voyage dans la partie ouest du lac Khovsgol, à la découverte de paysages qui s’annoncent magnifiques et des populations locales. On s’apprête à aller rechercher un peuple nomade qui habitent dans des tipis et élèvent des rennes: les tsaatans. Bref, un beau programme!
Font partie de l’aventure: Sophie, la française, Dominique, l’allemand, Guefen et Leron, le coupe d’israéliens et moi-même. Notre guide sera Gamba, un local.
Le minibus nous récupère vers 9h, on part faire quelques courses pour tenir deux jours. Puis, nous avons choisi de rejoindre le lieu de notre première nuit, Renchinlkhümbe, en longeant la moitié de la côte ouest du lac Khovsgol, afin de pouvoir un peu le voir, puis traverser les montagnes à l’ouest. Avec les pauses prévues, on devrait y passer la journée. Très vite, la route goudronnée laisse place à une route faite de gros graviers. Les minibus comme celui dans lequel nous sommes ne sont pas réputés pour leurs amortisseurs, on le sent déjà bien. Cependant, ils ont la qualité d’être solide et de passer de partout: et effectivement il va passer dans des endroits improbables! Après les premiers kilomètres le long du lac, et la traversée des multiples camps de yourtes pour touristes mongoles, la route se transforme en un simple chemin de terre. On prend le temps pour une petite pause thé afin d’apprécier le paysage qui s’offre à nous.
Le minibus repart et petit à petit la route le sentier devient de plus en plus accidenté. Dans le bus, on a l’impression d’être dans une machine à laver en marche! Des bons dans tous les sens, tantôt un petit choc contre le voisin, tantôt un petit choc au plafond, un régal! En dehors, c’est le contraste total, tout est calme, paisible.
A la deuxième pause, notre guide accompagné du chauffeur sortent du véhicule et partent dans une maison de bois à quelques centaines de mètres. Nous, on est très étonnés de voir que des gens peuvent habiter ici: impossible de venir ici sinon avec une moto, un van russe ou en bateau. Et on est déjà à 5h de route au moins! Mais il y a bien une famille ici. Finalement, un homme sort de la maison, prend sa moto et nous rejoins quelques minutes après vers une autre bâtisse, encore quelques centaines de mètre plus loin. On récupère un autre homme. Tout ça n’est pas très clair et aucun de ces locaux ne parle un mot d’anglais! On profite une dernière fois du lac puis on attaque l’ascension de la montagne et là, tout devient clair. Non seulement on est secoués dans tous les sens, mais on finit par s’embourber dans une mare de boue. Le minibus ne bouge plus. Tout le monde sort, on est immobilisés mais les mongoles restent calmes, ils sifflotent, ont l’air de se raconter des blagues. L’un des locaux récupère une pelle sans manche, part couper un petit arbre et en deux minutes nous fabrique le reste de la pelle.
Un autre coupe des branchages qu’il entrepose sous les roues. Finalement, après avoir pousser quelques minutes, on s’en sort, certains profitant pour recevoir de la boue de la tête aux pieds! On renouvellera l’opération une autre fois. On réussira à traverser les montagnes sans trop d’encombres au final, grâce à l’aide des nouveaux venus, alors que c’était difficilement envisageable sans eux étant donné l’état du chemin!
Arrivée en début de soirée à Renchinlkhümbe, ou plus exactement dans un patelin à quelques kilomètre du village, dans une grande plaine, avec quelques maisons parsemées, dont celle des parents de Gamba. A peine sorti du minibus, la mère nous accueille et on se retrouve à l’intérieur à manger des biscuits et boire le fameux thé au lait. On mange aussi des tartines au beurre de yak sur lesquels on rajoute du sucre. C’est très courant ici. Sont présents une marmaille de petits enfants, tous amusés de nous voir. Puis, on part monter les tentes dans le jardin, on nous indique un coin du jardin où faire un feu et préparer à manger, le tout avec l’aide bienveillante de notre guide. Puis le père de celui-ci nous rejoindra avec une de ces petites filles pour passer un moment avec nous. On passera une soirée tranquille au coin du feu dans cet endroit incroyable!
Mardi 13 août, grasse matinée, réveil tranquille, petit déjeuner au feu de bois, rangement des affaires. Puis on attends que les chevaux soient équipés en jouant avec les petits enfants.
Volga est un autre gars du coin, il sera notre second guide. On décolle finalement vers midi, avec neufs chevaux: cinq pour nous, deux pour les guides et deux pour porter les sacs.
Direction une grande steppe, premiers petits galops, de bonne sensations. Petit point négatif, j’ai eu le droit au coussin trop mou sur ma selle, le trot est donc très peu agréable pour mon postérieur!
Bref, pas de chûte au bout de cinquante minutes (cf article précédent), on semble partis pour de bon cette fois!
La steppe laisse ensuite place à des lacs, on traverse une rivière grâce à un système de navette en bois qu’un gars fait avancer à l’aide d’un cable métallique.
Puis on commence à grimper sur une colline. Gamba nous indique qu’on dormira de l’autre côté de celle-ci. On arrive ainsi au bord d’un lac, où l’on s’installe pour la nuit. La vue n’est pas désagréable!
Le lendemain, lever 8h, Sophie se révèle la plus équipée, et elle nous concocte le parfait petit-déjeuner à bases d’haricots, oignons, riz,… C’est notre chef cuisinière! On ne traine pas trop, il faut reprendre la route.
Aujourd’hui, on doit se rendre à Tsagaannuur faire quelques courses mais aussi pour aller demander l’autorisation au camp militaire de pénétrer sur le territoire des tsataans, qui est un parc National. Comme toujours avec les frontières, on a le droit à une grande mascarade. Mais alors des militaires qui se la jouent « Walker Texas Ranger » au fin fond de la Mongolie dans des cabanes en bois, ça n’a vraiment aucune crédibilité! Ils faisaient semblant d’éplucher nos passeport pour se donner un air puissant alors qu’ils ne parlaient et ne savaient lire que le mongole. Un ou deux regards de Gamba me confirmaient que c’était n’importe quoi! Cela dit on a quand même besoin de leur agrément, tout aussi antipathiques qu’ils sont! Finalement, on a leur aval mais on n’a pas eu le droit de revenir à Tsagannuurr. On n’a pas trop compris sur le coup. En fait, ils semble qu’ils nous ont laissé passé sans payer de permis, donc de façon a priori illégale. Mais je vous avoue que je n’ai toujours pas tout compris!
Sur la route, dès qu’on croise quelqu’un et que celui-ci s’arrête, il s’assied au bord de la route, nos guides font de même, échange de cigarettes, et ils ont l’air de refaire le monde pendant 5-10minutes. Heureusement qu’on est en pleine cambrousse presque déserte, sinon on n’avancerai pas beaucoup! Mais pas de panique, pour avancer, on avance, c’est presque un peu trop d’ailleurs, le passage au trot m’est toujours aussi peu agréable, j’ai beau chercher toutes les positions, rien n’y fait. La seule position que j’ai trouvé de rééllement confortable est la positio amazon, mais Gamba n’a pas voulu que j’y reste, il n’a pas de coeur celui-là!
Finalement, toute route disparait, nous laissant qu’un sentier, puis on coupe à travers un bois et on arrive dans une petite vallée, on campera près d’un ruisseau et d’une cabanne abandonnée, et sous la pluie!
Le lendemain, lever 7h. Aujourd’hui, l’objectif est de trouver des tsataans. Pas facile, ici on a l’impression d’être seuls au monde! Cela dit, Volga s’est renseigné la veille, et on devrait en trouver vers une montagne au loin.
En partant, on essaye de caser la poubelle sur un des chevaux porteurs. Gamba s’en saisit et la jette dans le feu. On essaye alors de récupérer au moins les conserves et le verre, ça nous crève le coeur de devoir polluer une si belle région. Mais ici, c’est comme à Baïkal, les gens n’ont aucune conscience de l’écologie, et Gamba récupère le tout et le balance dans les « toilettes » de la cabane abandonnée en rigolant et nous faisant comprendre que c’est pas grave puisque ça va être recouvert avec le temps…
D’ailleurs les toilettes, parlons-en! Ici les cabanes qui en font office sont un trou avec des planches pour poser les pieds. Jusque là rien d’extraordinaire. mais en dehors des villes, ceux-ci sont pourvu d’uniquement 3 murs, ainsi vous pouvez très bien faire vos besoins avec du monde qui passent devant vous; c’est très distrayant. Dans le villages de gamba, les murs font moins d’un mètre cinquante de haut, ainsi vous avez même un panorama de 360°. Je m’y suis retrouvé à 6h du matin, à regarder en même temps la mère de Gamba traire ses yaks! Mais ici, c’est normal, la pudeur, on la met de côté.
Revenons à notre randonnée. Au bout d’un petite heure on croise un cavalier tsaatan, il nous indique que des tsataans ne sont pas très loins au pied d’une montagne.
Effectivement, au bout d’un moment on aperçoit une tâche blanche au loin. On sort alors du sentier. Petit à petit se dessine deux tipis avec de la fumée qui s’en échappe. Et puis, on distingue des animaux qui se révèlent finalement être un troupeau de rennes, c’est incroyable! On attache ainsi les chevaux et nous rendons à la rencontre de cette famille nomade. On est accueilli dans un tipis où l’ont nous sert du thé au lait de renne: délicieux. Le lait de yak est très gras donc le thé en est souvent écœurant. Ici, c’est très doux et je m’en fait resservir volontiers plusieurs fois. Les enfants sont amusés de nous voir mais personne n’est étonnés. Nous ne sommes définitivement pas les premiers touristes à venir leur rendre visite.
Quelques minutes plus tard, je sors du tipi. Dominique a demandé s’il était possible de monter les rennes. Il suffisait de le demander, le père de famille, sort un selle, l’attache à un robuste membre du troupeau et nous voilà parti chacun notre tour à nous essayer à la conduite de renne! Avec ma taille, c’est assez original, un peu plus grand et je pourrais marcher en même temps que l’animal!
Cependant, je suis assez agacé quand ils nous demande à la fin l’équivalent de deux euros cinquante. C’est peu mais j’aurais aimé être prévenu avant, question de principe. Mais, n’oublions pas que nous sommes des touristes, et les locaux ont bien compris comment gagner quelques sous! Puis un gamin sort de son sac à dos des sculptures taillées dans des bois. Très jolis et pas très cher. On avait vu un des locaux à l’oeuvre dans le tipi. Sophie décide d’acheter un souvenir, nous on se contente d’essayer de communiquer avec la famille qui reste très sympa.
On restera ainsi deux heures environ, puis on doit reprendre la route. En effet, nous devons rejoindre Renchinlkhümbe en un jour et demi pour pouvoir y prendre le bus qui nous amènera à Moron puisque les autorités nous ne ont pas permis de revenir à Tsagaannuurr pour y prendre celui-ci. On ne traine pas, de plus le temps est de plus en plus menaçant.
En fin d’après-midi, nos craintes se confirment, il se met à pleuvoir. On part donc se réfugier chez des gens. Comme toujours, l’hospitalité est au rendez-vous, on nous sert à boire et à manger. Le père de famille s’est ouvert un gros orteils, Gamba sait que je travaille dans le domaine de la santé et me demande si je peux jeter un coup d’œil. Je n’y connais pas grand chose mais pas besoin d’être médecin pour voir que ce n’est pas du tout joli! L’entaille est profonde et commence à s’infecter. Et en plus, le blessé marche pied nus. Le plus curieux, c’est qu’on nous na vendu l’homme comme étant docteur pour cheval. Il devrait donc savoir quoi faire. Mais ici nous sommes au fin fond de la Mongolie… On essaye donc de lui inciter à aller voir un docteur mais leurs sourires nous font comprendre qu’il n’ira pas. Sophie m’aide à lui trouver médicaments et désinfectant. On essaye de lui expliquer une conduite à tenir pour les prochaines semaines, avec des règles d’hygiène, tout en sachant très bien que l’homme n’en respectera pas la moitié.
La pluie ne s’arrête pas mais il faut qu’on avance. On a beau être équipé, il fait froid, on est trempés. Deux heures plus tard on s’arrête pour dormir. Il est tard et il va bientôt faire nuit. On s’attaque donc au montage des tentes sous un pluie battante; il fait tellement froid qu’on à du mal à serrer les doigts. Pas facile du tout. Pour Gamba, c’est complêtement différent. Il part chercher un rondin de bois qu’il tire à l’aide de son cheval; et tout en sifflotant, il fait un feu avec des flammes d’un mètre de haut, toujours sous la pluie battante. Volga, quand à lui, s’occupe des chevaux, prépare à manger, comme si de rien n’était! Nous, on se tasse auprès du feu pour nous nous réchauffer, manger et faire sécher nos habits. Un gros réconfort après des dernières heures difficiles.
Le lendemain, la pluie s’est arrêtée quand on se lève à 8h. Petit déjeuner petits pois, oignons, champignons!
Puis on s’en va retrouver Renchinlkhümbe et la famille de Gamba. En route, on s’arrête chez la tante de celui-ci. Elle est âgée, ridée, mais magnifique et souriante. Elle se laisse volontiers prendre en photo.
On redémarre et on traverse une immense steppe. On est tous assez à l’aise sur nos chevaux maintenant. Même mon postérieur s’est habitué à subir les chocs de l’animal au trot! Ainsi, plusieurs galops se succèdent dans cette immensité, une vraie sensation de liberté!
Puis la pluie revient nous embêter. On ne traine donc pas trop et 3h de steppe plus tard, on arrive enfin. Gamba nous invite à manger chez lui, et sa femme nous prépare une sorte de pot au feu absolument délicieux qui tombe à point. Tout le monde est là, les enfants de Gamba que nous n’avions pas encore rencontrés, les grands parents et une nièce. On regarde les photos de famille, moment très convivial. Après un début de soirée pour le moins original à jouer au frisbee avec le grand-père et les petits-enfants, on finit finalement la soirée au bord d’un grand feu de camp, faisant le bilan de ces quatres jours intenses en émotion, accompagnés par Gamba, son père et la marmaille qui court dans tous les sens.
Samedi 17 août, après une grasse matinée, le minibus qui doit nous emmener à Mörön arrive vers 12h. C’est le moment des adieux, photos, etc,…
Nous partons ensuite à Renchinlkhümbe ou le chauffeur nous indique qu’il faudra attendre jusqu’à 14h pour pouvoir remplir le minibus. On négocie 13h. On se rend donc faire quelques achats pour la route, le trajet devrait durer 10h. Puis, on part manger dans un petit restaurant. A 13h, nous somme de retour et le chauffeur nous fait une belle entourloupe: il démarre comme prévu mais passe une heure à faire le tour du village pour récuperer du monde et discuter avec des gens! Nous partons donc à 14h, tous bien entassés, pour 10h de sentier: même pas peur! Et pas de surprise pendant le trajet, on est bien secoués. Il y aura juste un moment étrange ou au passage d’une sorte de frontière on nous demande de nous cacher. On arrive finalement vers minuit, et le chauffeur nous dépose dans une guest house où nous attend une yourte pour dormir.
Je me couche exténué, mais heureux de ces jours magiques passés dans cette immensité qu’est l’aïmag de Khovsgol. Le programme pour la suite: après une journée de repos et de visite de Mörön, Dominique, l’allemand, et moi même, avons décidé de nous rendre en stop plus au sud, vers le Lac Blanc (Tsagaan Nuur, à ne pas confondre avec Tsagaannuur!) et Tsetserleg, dans l’aïmag d’Arkhangaï, afin d’y passer quelque jours pour ensuite se séparer, je dois en effet retourner à Oulan Bator faire mon visa chinois avant de partir dans le désert de Gobi. Quand à Dominique, il souhaite descendre directement dans ce désert là. Sophie a prévu, elle, de passer par Erdenet, où se trouve une immense mine de cuivre à ciel ouvert, avant de retourner à Oulan Bator. Quant à nos israéliens, on ne sait pas trop. On les a senti perdu tout le voyage, surtout Leron qui soupirait régulièrement, et appelait sa douce « Gueffeennnn » comme un enfant qui veut savoir: « quand est-ce qu’on arrive? ». Un vrai mystère ces deux-là, quand on voit le cadre dans lequel nous étions. On ne leur enlèvera cependant pas qu’ils étaient très sympas!
Pour l’anecdote, on apprit le lendemain par Saraa (guest house Mörön) que la police nous recherchait activement dans le parc National car nous n’avions pas payé les permis d’entrée, ce qui explique pourquoi les militaires de Tsagaannuurr nous ont demandé de ne pas revenir et pourquoi on a du se cacher sur e chemin du retour!
La suite de l’aventure ne sera pas de tout repos! Mais comme d’habitude, vous saurez pourquoi au prochain épisode, car tout simplement, il faut que je trouve le temps de l’écrire!
Top top top !!!
Toujours aussi captivant !!!
Extra ! Pas de photo de ta montée à cheval en amazone ? encore bien ri en lisant ton article !
En chansons et en musique , ce pourrait être : Mais d’aventures en aventures, de train en train de Serge Lama, ou bien l’aventure commence à l’aurore, à l’aurore de mille chemins de Jacques Brel……
Super ! Félicitations pour arriver à tenir le blog ! Je sais que ce n’est pas chose facile que de gérer une telle petite entreprise ! En tous cas au moins c’est fait…et très bien fait !
J’imagine le bonheur, dans quelques années, à relire ces lignes et à regarder ces belles images !
Bonne route mon KéKé !